Oncle Joe raconte : Mes années à la mine
J'aimerai prendre un moment pour vous parler de mes 8 années de dur travail dans les mines de charbon. J’ai vécu en France pendant 12 ans dans l’Est Mosellan, dans la région de mines du groupe de Petite-Rosselle qui faisait partie des Houillères de Bassin de Lorraine (H.B.L.).
Après la Seconde Guerre mondiale, les mines de charbon de la région étaient en plein essor.
95% de la population ouvrière de la région travaillait dans, ou pour les mines et, de ce fait, il n’y avait pratiquement pas de chômage dans cette région industrielle.
A l’époque, presque la moitié de ces ouvriers venaient des pays d'Europe de l'Est et le reste était fourni par la population locale. Pendant la deuxième guerre mondiale, l'Alsace et la Lorraine avaient été annexée par l'Allemagne et beaucoup d'allemands y ont travaillé pendant cette période.
Après la guerre, ces mêmes mineurs, pour la plupart sarrois, sont restés dans ces mines et continuèrent à y travailler mais cette fois pour la France !
Le Puits Gargan à l'époque du récit de Joe
Le groupe minier de Petite-Rosselle se composait à l’époque de 7 mines actives :
Le Puits Marineau, le Puits Simon, le Puits Wendel, le Puits Vuillemin, le Puits Saint Charles, le Puits Gargan et le Puits Saint Joseph.
Il restait aussi les premières mines de cette région qui n’étaient plus actives : le Puits de Schoeneck, le Puits Sainte Marthe et le Puits Sainte Stéphanie.
Le travail dans les mines était difficile et dangereux mais permettait en contrepartie d'offrir un niveau de vie correct aux familles, qu'elles soient autochtone ou d'origines étrangères.
Les mines offraient des avantages non négligeables à leurs salariés tels des logements et des services publics gratuits, de bons programmes de santé englobant tous les soins médicaux, des hôpitaux, des médecins, des maisons de repos et même une demi-douzaine de lieux de vacances réservés aux familles de mineurs.
Tout cela avait bien entendu un coût et une partie du salaire servait à couvrir ce programme de santé. Quant aux offres de vacances, elles étaient prises en charge à 75% par les mines.
Cette industrie minière florissante faisait travailler beaucoup d'entreprises locales sous-traitantes et les nombreux commerçants des villes et villages environnants se partageaient également une bonne part de ce gâteau...!
L'épicerie Rennolet à Schoeneck durant les années 55-60
Même si le métier de mineur de charbon était considéré par certains comme un des moins valorisants, à cette époque, l'Est Mosellan et le Nord avaient un niveau de vie bien plus élevé que d’autres régions de France grâce à cette industrie charbonnière.
Ma famille était ce que l’on appelait communément une «famille nombreuse» et nous avons connus quelques périodes difficiles durant les deux premières années après notre arrivée dans les baraques de la Ferme de Schoeneck.
Nous vivions au jour le jour, bien souvent à crédit, car nous étions totalement démunis lors de notre arrivée en France et il fallait acheter beaucoup de choses pour faire fonctionner le ménage.
Malgré ces difficultés de départ, au bout de quelques années, notre situation s'est stabilisée et nous n’avions plus besoin de crédit, sauf peut-être lorsqu’il s’agissait de faire de très gros achats.
Je peux dire ici que la mine a permis à tous les ouvriers, même aux nouveaux arrivants, de bénéficier d’une vie décente et équitable.
Je suis arrivé en France dans cette région minière avec ma famille en janvier 1948. J'avais 10 ans, je venais d'Ukraine en passant par les camps de réfugiés allemands et n’avait, jusque là, suivi aucune scolarité. (1)
Mon avenir immédiat consistait à aller travailler à la mine et, comme beaucoup d'enfants, j’ai commencé l'apprentissage du métier de mineur à l'âge de 14 ans, d'abord à l'école des mines et ensuite dans les Puits Wendel et Vuillemin.
J'ai travaillé à la mine pendant 8 ans, jusqu'en août 1960. Les trois premières années au jour, d’abord à l’école des mines puis à différents postes dont certains étaient plus agréables que d’autres…
Les 5 dernières années de ma vie de mineur se sont ensuite déroulées au "fond" dans les différents étages. Au Puits Vuillemin nous travaillions dans différents niveaux sous terre : -291, -364, -520, -600, -750 et -850 mètres.
J’ai travaillé dans tous ces étages sauf au -291. Certains de ces niveaux étaient froids et humides, d’autres chauds comme l'enfer. Je suppose qu'à 850 mètres de profondeur, nous étions proches de l'enfer !
Mais quel que soit le niveau, il y avait toujours des rats autour de nous qui essayaient de grapiller une partie du casse-croûte.
J’ai travaillé essentiellement au niveau – 600 dans les travaux de préparation associés à l’exploitation d’une nouvelle veine de charbon. Lorsque nous travaillions dans ces chantiers, nous recevions la même prime que les mineurs affectés à la production de charbon et cette gratification supplémentaire représentait entre 2 et 4% de notre salaire quotidien.
A vrai dire, pendant toutes mes années à la mine, je n'ai jamais travaillé directement « dans » le charbon sauf pendant ma période de formation.
Dans la mine il y avait toujours le danger d'explosion. Lorsque cela se produisait et que vous travailliez dans ces zones vous pouviez être blessé ou même tué.
Le Puits Vuillemin a connu quelques tragédies majeures. En 1907, 83 mineurs ont été tués suite à une explosion de grisou, en 1943, 8 mineurs ont été tués à cause d'un effondrement, et en 1948, 23 mineurs ont été tués par une autre explosion due au grisou. Je m'en souviens très bien, c'était l'année de notre arrivée en France et ce jour là, j'étais à l'école lorsque j'ai appris que deux des personnes tuées étaient habitaient le village.
En 1958, 12 autres mineurs ont été tués dans une nouvelle explosion lors d’un accident qui s'est produit dans l'équipe de l'après-midi. J’ai eu beaucoup de chance car nous travaillions ce jour-là dans l'équipe du matin mais j’ai perdu un bon ami dans cet accident. Nous en avons perdu deux autres en 1951 et encore deux en 1955. (2)
Vers 1995, la plupart des mines ont fermé car la demande de charbon a diminué.
C’en était fini de l’essor industriel du charbon et nous avons connu plus de chômage et la fermetures de nombreux magasins et entreprises sous-traitantes.
À ma connaissance, personne n'est devenu millionnaire en travaillant dans ces mines, la vie était dure mais on ne vivait pas dans l’inquiétude d'être sans emploi.
Les temps changent et, de nos jours, on n'entend parler des mines de charbon que lorsqu'il y a des services commémoratifs pour honorer les mineurs qui ont donné leur vie pour aider à reconstruire le pays après la seconde guerre mondiale...
Oui chers amis, n’oublions pas que les mines et les mineurs ont joué un rôle important dans la reconstruction de ce beau pays de France !
* * * * * * * * * *
Portrait : un chef exceptionnel
Dans l'un de mes derniers commentaires, j'ai mentionné le nom de Gottfried Christman et j'ai dit que cet homme était un super gars. Il est décédé à l'âge de 89 ans après 35 ans de bons et loyaux services au Puits Vuillemin en payant un lourd tribut à la mine car il est mort de la "silicose", cette maladie pulmonaire qui a tué tant d’ouvriers mineurs.
J'ai rencontré Gottfried en 1955. Il était le chef de notre équipe de travaux, avait 14 ans de plus que moi et de ce fait, travaillait déjà à la mine lorsque je suis né...
Il était marié, père de 3 garçons et la seule éducation qu'il avait reçue était celle dispensée par les deux instituteurs de la petite école primaire de Folkling, fréquentée à l’époque par une centaine d’enfants de tous âges originaires du village et des environs… Comme beaucoup de jeunes de sa génération, Gottfried a commencé à travailler dans les mines de charbon à l’âge de 14 ans. Marié à 23 ans avec une jeune femme originaire d'Oeting, il vivait chez ses beaux-parents et, chaque jour, sauf le dimanche, il se rendait chez ses parents pour fabriquer des ‘parpaing’ avec son père pour la future maison qu'il allait construire à Folkling. Cela leur a pris pas mal de temps et d’énergie mais Gottfried est allé au bout de l’aventure et réussi à construire ce qui allait être « sa » maison et dont il avait lui-même dessiné les plans.
Je dois dire que c'était une belle maison de 4 chambres de style ranch, une architecture peu répandue à l’époque…
Gottfried était par ailleurs très croyant. Il fabriquait ses parpaings, travaillait dans les champs chaque jour de la semaine après le dur labeur de la mine mais le dimanche était sacré. Ce jour-là il allait à la messe et chantait dans la chorale de l'église d'Oeting puis, l’après-midi, venait nous retrouver aux matchs de football pour se détendre et parler de tout et de rien mais jamais du travail…
Gottfried était très dévoué à sa famille. C’était un homme qui travaillait dur, il était poli et cultivé, amusant à côtoyer et rendait de ce fait notre dur labeur un peu plus facile... Il avait le sens de l’humour et nous faisait même parfois d’innocentes petites farces. Pendant les cinq années où je l'ai côtoyé, je ne l'ai jamais entendu dire des gros mots ou des jurons, ce qui était presque atypique pour un mineur de charbon !
Il ne fumait pas et ne buvait pas, enfin pas de façon déraisonnable, car, après le travail lorsque nous attendions le train pour retourner à la maison, nous dégustions ensemble deux ou trois fois par semaine une canette de bière à la buvette du Puits.
Je me souviens également d'un commentaire que Gottfried m’a fait alors que nous faisions casse-croûte au fond :
- Joe, sans éducation appropriée, je suis devenu mineur de charbon... Mais laisse-moi te dire qu'aucun de mes garçons ne finira ici. Je ferais tout pour leur donner une bonne éducation afin qu'ils aient une meilleure vie... Oui, ces mines de charbon nous permettent de vivre, mais ce type de travail et cette vie ne sera pas celle de mes enfants...
J’ai appris bien plus tard que deux de ses garçons sont devenus, l’un ingénieur et l’autre pharmacien… Ironie du sort, malgré la déclaration de leur père, celui qui est devenu ingénieur est parti dans le Nord de la France pour exercer son métier… dans une mine de charbon ! Ainsi va la vie…
Petite parenthèse historique :
L'Alsace-Lorraine a été annexée à l'Allemagne d'environ 1870 à 1918. Après la première guerre mondiale et la défaite des Allemands, la France a récupéré l'Alsace – Lorrain. En 1940 après la défaite de la France face à l'Allemagne nazie, l'Alsace - Lorrain a de nouveau été annexée à l'Allemagne nazie et en 1942, le régime allemand a alors décidé d'enrôler les jeunes alsaciens et lorrains dans l'armée allemande. Gottfried avait à cette époque environ 18 ans et n’était absolument pas prêt à servir dans l'armée allemande et a passé près d'un an et demi à se cacher et à vivre dans le grenier de la maison parentale. Nous avons beaucoup parlé de cette époque pendant notre temps libre. Il a vécu totalement isolé et a eu de la chance et s'en est sortir :
- C'était très dur de vivre seul sans personne à qui parler et sans jamais pouvoir mettre un pied dehors… Pendant cette période, je pense que j'ai lu tous les livres que nous avions à la maison. Avec l'aide de maman et papa, j'ai pu lire également à peu près tous les livres de la petite bibliothèque de l'école du village... J'ai beaucoup écrit, j’ai fait de nombreux dessins sur tous les sujets possibles et imaginables… Ce n'était pas facile mais c’était toujours mieux que d’être enrôlé dans l'armée allemande et de combattre dans leur guerre...
Les jours et les nuits étaient très longs, surtout pendant le froid en hiver ou pendant la canicule en été… Je n’avais que 2 bougies pour seul éclairage et dans la journée, seules les deux petites fenêtres de toit laisser passer un peu de clarté et d’air frais… Mais, ce qui me manquait le plus c’était de ne pas pouvoir discuter avec des gens et mes amis...
Bien souvent je me parlais à moi-même, et même parfois aux murs, aux araignées ou aux pigeons qui nichaient avec moi dans le grenier... !
Toute cette « auto-formation » a finalement porté ses fruits et, lorsque Gottfried est retourné au travail quelques années plus tard, certaines de ses idées ont amélioré nos travaux dans les chantiers de préparation à l’exploitation du charbon…
Oui chers amis, j'ai beaucoup appris de Gottfried, peut-être même plus que de mon propre père. Dans ma vie, j'ai rencontré beaucoup de gens, mais seulement une poignée de gars comme lui. Je dirais simplement que Gottfried était un « super gars », comme ami et comme supérieur. On ne peut jamais oublier de telles personnes car il m’a marqué de son empreinte pour le reste de ma vie...
Pour cela, Gottfried mon ami, où que tu sois, un grand MERCI !
(1) Lire le récit Les chemins de ma vie en cliquant ICI
(2) Lire le récit Le drame de la famille Birig en cliquant ICI
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Clément Keller : Le retour des Brabeks (11)
Nous sommes (toujours et encore !) en 2064 et des brouettes.
Le monde a bien changé et une équipe composée de savants, de techniciens et de personnages hors du commun a été mise sur pied pour partir à bord du vaisseau C-DLADOB vers les confins de notre galaxie afin de retrouver les traces d'origine de la civilisation humaine localisée sur la planète Manflou.
Le but de cette expédition, sponsorisée par le groupe Nauss-Talgia, leader incontesté du Blog tridimensionnel L.R.E.M. (Lassant, Ringard, Enervant & Mytho), consiste à récupérer les gènes d'origine de l'espèce humaine afin de les réimplanter dans l'ADN des dirigeants de notre planète pour leur redonner sagesse, intelligence et un sens aigu de la réflexion. Bref, une mission que l'on pourrait d'ores et déjà qualifier d'impossible. C. Keller
→ Remarque importante : si vous ne lisez pas les épisodes précédents, vous risquez de ne rien comprendre du tout à ce récit plein de rebondissements.
EPISODE 1 - EPISODE 2 - EPISODE 3 - EPISODE 4 - EPISODE 5 - EPISODE 6 - EPISODE 7
EPISODE 8 - EPISODE 9 - EPISODE 10 - EPISODE 12 - EPISODE 13 - EPISODE 14
EPISODE 15 - EPISODE 16 - EPISODE 17 - EPISODE 18 - EPISODE 19
EPISODE 20 - EPISODE 21 - EPISODE 22
Au moment même où Bloc le Rek poussait la porte de la cabine de téléportation, Yves Abyen, vêtu de sa robe en organza rose, un sac Golce et Dabanna à la main, quittait sa chambre d’Hôtel du Grand Hyatt de Berlin pour se diriger vers l’ancienne Porte de Brandebourg, (rebaptisée Porte Mélanchouille (1) lors de la journée internationale des 127 adhérents de la gauche prolétaire réunie) devant laquelle allait se dérouler une partie du défilé de mode auquel il allait participer.
Quelques minutes plus tard, après avoir longé le Potsdamer Platz, Yves Abyen arriva au carrefour de la Ebertstrasse, cette belle avenue qui donnait directement sur la Porte Mélanchouille…
C’est exactement à cet endroit, sur le trottoir à côté du parc public, à quelques pas de la statue de Goethe, qu’un chien de race indéterminée et apparemment perdu, leva soudain son museau, renifla, tourna la tête, aperçut la robe rose, se leva et se mit à suivre Yves Abyen…
Ce dernier accéléra légèrement le pas mais l’animal ne le lâcha pas d’une semelle…
Yves essaya de courir, mais ses hauts talons et sa robe l’empêchèrent de retrouver sa foulée légendaire de sportif du dimanche, cette foulée légère et régulière qui faisait tant d'envieux lorsqu'il courait le matin bien souvent avant l'aube dans les forêts environnantes...
Finalement, au bout d'une centaine de mètres, les chevilles douloureusement meurtries et presque à court de souffle, il se retourna et vit que le chien était toujours à ses trousses…
Yves Abyen avait toujours rêvé de posséder un animal de compagnie, mais son travail à bord du vaisseau C-DLADOB lui laissait peu de temps libre. Il avait repoussé cette éventualité à plus tard, lorsqu’il prendrait sa retraite de spationaute et qu’il vivrait dans le coquet pavillon qu’il avait fait construire dans le lotissement de Cheu-Neck (2), pas loin du centre de contrôle spatial et à quelques centaines de mètres seulement de l'éolienne sylvico-ravageuse géante.
Yves s’arrêta et l’animal s'approcha lentement, le renifla plusieurs fois craintivement puis se frotta longuement contre ses jambes bronzées et musclées…
- T’as l’air d’être un gentil chien toi ! Lui dit-il en caressant le museau de l’animal qui le regardait d’un air triste…
- T’as pas de maître ? T’es abandonné ? Pour seule réponse, le chien émit un petit aboiement plaintif qui fit fondre le cœur d’artichaut d’Yves…
- Tu veux venir avec moi ? Je vais t’adopter et on fera la route ensemble…
Aussitôt dit, aussitôt fait. Yves détacha la ceinture de sa robe et en confectionna une laisse qu’il mit autour du cou de l’animal qui maintenant lui léchait affectueusement la main…
- Je vais t’appeler Klébard et on deviendra des potes inséparables à partir de maintenant !
Entre-temps, une foule de curieux s’était assemblé autour d’eux et les commentaires fusaient…
- C’est une vedette de cinéma ? Non une gentille membre de la SPA… Non, je pense plutôt que c'est un acteur de télé réalité ! Des touristes russes coiffés de chapkas colorées lui demandèrent des autographes et un jeune gardien de la cohérence civique voulut même faire un Selfie3D (3) avec lui… Yves se plia aimablement aux demandes des uns et des autres, fit de nombreuses photos en tenant Klébard dans ses bras puis, après une dernière caresse à son nouveau compagnon, se releva, empoigna la laisse improvisée et consulta sa montre.
Il était tard et il devait se dépêcher s’il ne voulait pas rater l’ouverture du défilé…
* * * * * * * *
Dans la cabine de téléportation du vaisseau spatial, Bloc le Rek avait pris place sur le siège et compulsait avec attention la tablette holographique qui servait de mode d’emploi au système. Le guide était subdivisé en 3 parties et Bloc suivit scrupuleusement les directives…
- Ça n’a pas pas l’air bien compliqué tout ça… Voyons : Phase 1, connexion et choix de la destination, Phase 2, Début du transfert, Phase 3, Arrivée à l’endroit choisi et déconnexion…
Il ne fallut que quelques petites minutes à Blok pour assimiler le fonctionnement du système. Tout en lisant le tuto, ses doigts tapotaient le clavier sensitif du tableau de commande…
- Voilà, nous y sommes, je crois que je vais me payer quelques jours de vacances au frais de la princesse !
La porte de la cabine se referma dans un chuintement et le laser de dématérialisation se mit en mouvement pour scanner la massive silhouette de Bloc. La décomposition moléculaire ne dura que quelques secondes et c’est dans l’Ontario, en rase campagne, au nord du lac doré dans l’ancienne Mapleside Sugar Bush que le corps de Bloc se reconstitua dans un bourdonnement melliflueux… Lorsque la porte s’ouvrit, Bloc se retrouva au centre d’une cabane à sucre canadienne dans laquelle se déroulait une fête populaire touristique identique à celles qu’on y donnait encore au début du XXIème siècle…
Vêtu de son gilet en peau et de sa toque de castor, Bloc faisait tellement « couleur locale » que personne ne lui prêta attention lorsqu’il sortit de la cabine.
Seule une légère auréole d’électricité statique résiduelle qui s’estompa rapidement aurait pu attirer le regard d’un observateur attentif mais, depuis que cette cabine de transfert avait été installée dans la cabane, les propriétaires des lieux et la clientèle habituelle avaient pris l’habitude de voir défiler des « téléportés » de tous les coins du monde et plus rien ne les étonnait…
Bloc avait pris place à l’une des longues tables, leva la main pour appeler un des serveurs et commanda sans hésiter un « Caribou », cette boisson traditionnellement consommée au Canada lors du Carnaval de Québec, du Festival du voyageur au Manitoba ainsi qu’à la grande fête de la galette de sarrasin de Louiseville.
- La vie est belle se dit-il en tapant dans ses mains au rythme de la musique… Je crois que j’ai fait le bon choix et l’ambiance ici va me faire oublier pendant quelques temps le boulot et les inepties quotidiennes à bord du C-DLADOB…
* * * * * * * * * *
Pendant que Bloc prenait du bon temps au Canada en s'entrainant à jouer aux cuillères musicales avec les autochtones, Chang-Tal et Ted Oupty avaient regagné leur cabine à bord du vaisseau spatial. La journée avait était rude et Chang-Tal s’affala, exténuée, dans son fauteuil préféré.
Elle ferma pendant un instant ses yeux, respira profondément puis saisit dans un geste élégant, sur l’étagère à livres son ouvrage préféré, une édition rare reliée en peau de zébu des 837 nuances du Kamou Satra (édition 2061) (4).
Ted Oupty qui l’observait du coin de l’œil s’approcha d’elle, posa un baiser furtif sur son genou gauche et chuchota :
- On va faire de la lecture ma petite gimblette gymnophore…
- Oui mon abutyrotomofilogène basané, enlève tes bottines à talonnettes, mets tes lunettes et viens près de moi, on va relire ensemble la page 137, celle qui décrit si bien la position de la crépinette jubilatoire (5)…
Ted ne se fit pas prier car il adorait faire la lecture en compagnie de sa bien-aimée. Il délaça en un éclair ses bottines à talons compensés, les posa soigneusement à côté de sa table d'élongation (6), prit son élan et sauta avec la grâce d'un félin attaquant une gazelle sur les genoux de sa dulcinée… A suivre.
(1) Giovanni Luciano Mélanchouille était un politicien très connu au début du XXIème siècle qui se reconvertit après une septième défaite électorale en fabricant de pâtes alimentaires. Il garda néanmoins son patronyme pour l'intégrer dans le slogan publicitaire de ses pâtes :
Chouette maman, des Mélanchouilles, c'est meilleur qu'une simple nouille !
(2) Scheu-Neck est un village de l'est de la province France où se trouve le centre de contrôle de la flotte des vaisseaux du conglomérat C-DLADOB. Anciennement, ce village haut en couleurs était habité par une peuplade primitive, les Schénégga Fôtza qui s'étaient mobilisés sans succès vers 2020 contre l'implantation, dans la proche Merklerie d'une méga-éolienne de dimensions pharaoniques. Pour consulter les archives de l'époque, cliquez ICI
(3) Les gardiens de la cohérence civique ont remplacé les anciens policiers après la grande réforme du statu quo mis en place par la Droite Sinusoïdale Transitive (D.S.T.) dirigée par le ministre de l'intérieur, de l'extérieur, d'en haut et d'en bas, le nain Darma. Le selfie 3D a été démocratisé vers 2030 sous le règne de Macronus II et connut son apogée vers 2060 lors de l'invasion de l'Atoll de Tokelo par les troupes armées inuites.
(4) Cette édition parut tout d'abord dans la collection La Pleiade avant le rachat des droits d'auteurs par le magnat des éditions littéraires Bigard-Dunaur, un humoriste débridé qui avait envisagé de se présenter aux élections présidentielles françaises dans les années 2020 avant J.C. (Jean Castex).
(5) Contrairement à la scapulette asynchrone (7), la crépinette jubilatoire ne nécessite pour seuls accessoires qu'un chausse pied (si possible en corne de buffle), une varlope ainsi qu'un riflard à corroyage.
(6) Lire impérativement l'épisode N°8 en cliquant ICI
(7) Et puis quoi encore ? Vous voulez des photos ?
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Oncle Joe raconte : Les chemins de ma vie (1)
Chers ami(e)s, le but de cette rétrospective est de de retracer au mieux de mes connaissances et de mes souvenirs les différentes chemins que moi-même et toute la famille Surowiecki avons empruntés au long de notre vie.
Je vais essayer de respecter au mieux la chronologie de tous les évènements et les noms des différents intervenants même si ma mémoire d'octogénaire est, après toutes ces années, légèrement fatiguée.
Voici le fil conducteur des différentes étapes de ma (déjà) longue vie :
(1) Ukraine
Notre maison, la maison de grand-mère
(2) Allemagne
Nos différents points de chute :
Première résidence à Bad Grund
Seconde résidence à Bad Grund
Troisième résidence à Bad Grund
Göttingen
(3) France
Résidence à la Ferme de Schoeneck
Résidence à Behren-Cité
(4) États-Unis
Residence à Wood Street
Residence à Crystal Street
Residence Rue Hoyne
Residence Hirsh Street
Résidence actuelle dans le village de Streamwood près de Chicago
* * * * * * * * *
Maman et papa se sont mariés à Boratyn en 1932. Ma sœur Irène est née en 1934 et je vis le jour le 27 janvier 1938 vers 3 heures du matin par une froide journée d'hiver selon maman.
Notre maison était située à environ 800 mètres du village. Je me souviens d’immenses champs près d’une grande ferme et d’un étang à côté de la maison que papa avait creusé pour les oies, les canards et les poules. Irène m'a dit qu'elle m'a sorti un jour de cette eau boueuse quand j'avais environ 2 ans. Merci à elle, sinon je ne serais plus là pour vous raconter les chemins de ma vie !
Un village en Ukraine ressemblant à celui où Joe a vu le jour...
J’ai vécu environ 5 ans de ma jeune vie dans cette maison appartenant à grand-mère.
Vue de l'extérieur, elle semblait petite avec son toit de paille et de chaume.
A côté du bâtiment il y avait une dépendance avec une porte en demi-lune et à environ un mètre de la maison il y avait une grange de taille moyenne qui abritait une vache, un cheval, une chèvre, des poulets ainsi que le foin et la nourriture des animaux!
À l'intérieur, il y avait une grande cuisine avec une immense cheminée et trois chambres. Grand-mère cuisinait dans cette grande cheminée.
Au-dessus de la cheminée il y avait une longue étagère en pierre entourée d'une petite balustrade en bois. Cette étagère était la zone de stockage des provisions de Grand-Mère et également mon lieu de couchage en hiver. La cuisine avait deux fenêtres à l'avant et une porte donnant sur l'extérieur. A l’arrière de la cuisine, deux fenêtres et des portes donnaient sur l’intérieur et toutes les chambres avaient une fenêtre.
A tous les étages, le sol était en terre battue. Il n’y avait aucune installation d'eau courante à l'intérieur, une roue à aubes était située à l'arrière et bien protégée en hiver. La maison toute entière était chauffée par la grande cheminée, et, si la cuisine était belle et chaleureuse en hiver, les chambres étaient glacées et il fallait quelques bonnes couvertures pour y dormir au chaud.
Dans la maison de Grand-Mère
La cour devant la maison était de taille moyenne. Dans un coin, il y avait une niche pour chien (mais pas de chien) et des parterres de fleurs tout autour de la cour.
À l'époque, nous, les enfants, cueillions certaines de ces fleurs et Grand-Mère se mettait en colère. C’était une petite dame mais elle n'avait aucun problème pour nous ‘maîtriser’. Grand-Mère ne restait jamais longtemps en colère, mais, quand ça lui arrivait, elle allait faire un tour derrière la maison dans le jardin et après quelques minutes, elle revenait avec un large sourire et tout était oublié…
À l'arrière de la maison, il y avait également un puits duquel nous remontions l'eau potable. Nous possédions également un potager de belle taille ainsi qu’un grand verger grand comme un terrain de football avec 20 arbres, dont de nombreux fruitiers.
Cette endroit servait également de pâture pour la vache, le cheval et pour la petite chèvre. Les arbres fruitiers étaient principalement des pommiers, des poiriers, quelques pruniers et deux cerisiers dont la moitié des fruits étaient dévorés par les oiseaux et surtout par de grands corbeaux noirs !
À côté de la maison se trouvaient la dépendance ainsi qu’une grange de bonne taille de couleur grise avec un toit de paille et de chaume. La grange abritait le cheval, la vache et la chèvre ainsi que les poules et un majestueux coq coloré. Elle faisait également office de zone de stockage pour certains aliments et abritait également quelques squatters sous la forme d’une dizaine de pigeons et de 3 chats qui n’entraient jamais dans la maison.
A une vingtaine de mètres de cette grange partait un chemin de terre qui menait vers un ruisseau calme dont le débit devenait rapide au début du printemps et pendant les saisons pluvieuses.
De l'autre côté de la maison, il y avait encore une cour et un jardin appartenant également à Grand-Mère. Un peu plus loin, une grande ferme propriété des voisins, la famille Kulas.
A quelques centaines de mètres en amont, une autre ferme qui appartenait à la famille Mlak.
Toute la propriété de Grand-Mère, sauf l’avant, était fermée avec des clôtures, et, en partie par des haies épineuses d’une soixantaine de centimètres de haut.
La maison était occupée par Grand-Mère bien sûr, Grand-Père, (quand il était là, car Grand-Père voyageait beaucoup), Eddy (le frère aîné de maman), Marika (la sœur cadette de maman), ma sœur Irène et moi !
Il me reste quelques souvenirs de cette première enfance lorsque nous vivions avec ma sœur Irène dans la maison de Grand-Mère. Je me souviens d'être allé à l'église en compagnie de Grand-Mère et de maman.
Ce devait être au printemps parce qu’il y avait plein de verdure et de fleurs tout au long du ruisseau que nous traversions en passant par un petit pont de bois.
Ensuite, nous montions une petite colline pour arriver jusqu’à la petite église entourée d'herbe verte et parsemée de petites fleurs jaunes qui poussaient au pied des arbres.
Nous marchions lentement en direction de l’église et, au loin, nous entendions déjà la musique et les chants des paroissiens qui s’échappaient de l’édifice.
C’était le jour de Pâques, nous étions vêtus de nos plus beaux habits et Grand-Mère et Maman étaient endimanchées et portaient des paniers avec des œufs colorés et un gâteau qu’il était d’usage de faire bénir le jour de Pâques…
* * * * * * * * * *
Nous étions en train de prendre notre petit déjeuner lorsqu’un matin, Grand-Mère vint en courant et en hurlant appeler Eddy pour qu’il prenne un balai ou un autre accessoire afin de nous débarrasser des porc-épic qui étaient en train de manger tout ce qui poussait dans le jardin, surtout les fruits tombés des arbres avec lesquels Grand-Mère faisait de succulentes tartes et de la confiture.
Pour Eddy ce n’était pas un problème. Il alla chercher les garçons du voisin Kulas et, avec leur aide, il remplit une énorme boite en carton avec les porcs épics, puis se dirige vers le ruisseau pour apprendre à ces prédateurs la natation...
Arrivés au bord du ruisseau il les jeta sans hésiter dans l’eau puis rebroussa chemin sans un regard en arrière. Ce spectacle était devenu un rituel deux fois par an et ne posait pas le moindre cas de conscience à Eddy et à ses copains.
Papa et oncle Eddy travaillaient dans les champs depuis une semaine à couper de l'herbe afin de constituer la réserve de fourrage d'hiver pour les animaux lorsqu'un soir, au retour des champs, alors que nous jouions devant la maison Marika et Irène les ont aperçus sur le chemin du retour des champs. Courant à leur rencontre, quelle ne fut leur surprise quand elles virent qu'oncle Eddy tenait un chiot dans ses mains...
Le travail dans les champs
Nous étions fous de joie à la vue de ce chiot mais Grand-Mère s’approcha et, après avoir examiné l’animal, nous dit :
- Oui les enfants, c’est bien un chiot mais pas un chiot chien, c’est un chiot «loup» ! Alors, demandez d’abord à papa si vous pouvez le garder...
Papa acquiesça mais seulement si Grand-Mère était d’accord et, après de longues palabres, cette dernière accepta à la condition impérative que nous nous engagions à nous occuper de lui. Elle rajouta que c’était tout de même un bébé loup et que, lorsqu’il serait grand, nous devrions le laisser partir. Cette dernière remarque ne nous fit pas plaisir mais pour l'instant le plus important à nos yeux était de trouver un nom à ce petit bonhomme (qui allait d'ailleurs s'avérer être une fille par la suite)...
Nous avons proposé tous les noms qui nous passaient par la tête lorsque Grand-Mère suggéra Sirka qui signifiait 'étoile' en ukrainien à cause de la petite tache en forme d'étoile que notre protégée avait sur la tête. Ce nom fut adopté à l'unanimité et Sirka devint ce jour-là un membre officiel de la famille Surowiecki...
* * * * * * * * * *
Marika se rendant compte que Sirka avait faim alla récupérer un vieux biberon qu’elle remplit de lait de chèvre. Elle essaya de lui donner la tétée, mais, peine perdue, le lait coulait partout sauf dans la gueule du chiot. Ce fut une fois de plus Grand-Mère qui trouva la solution en utilisant un vieux gant dont elle avait coupé le bout d’un doigt et qu’elle fixa à l’aide d’un morceau de ficelle au goulot du biberon…
Maintenant le lait coulait en grande partie dans la gueule du chiot et le problème de son alimentation était réglé avec toutefois l’inconvénient que Sirka nous pissait dessus pendant qu’il tétait… Mais cela ne dura que quelques semaines car le chiot grandissait à vue d’œil et, un beau matin, Grand-Mère décida qu’il était grand temps de mettre Sirka à l’extérieur dans sa niche et d’en faire un chien de garde.
Sirka remplit son rôle de chien de garde avec assiduité jusqu’à ce fameux jour grisâtre et pluvieux où nous étions Marika, Irènes et moi seuls à la maison car Grand-Mère était occupée à l’extérieur. Marika et Irènes étaient assises à table et jouaient aux cartes pendant que moi je rêvassais tout seul dans mon coin…
Dehors, le vent soufflait et on entendait la pluie tomber en rafales. Soudain, Sirka se mit à aboyer comme un fou mais nous ne savions pas pourquoi et avions peur de sortir pour voir ce qui se passait… Quelques minutes plus tard, malgré la peur, Marika se dirigea vers la fenêtre et jeta un rapide coup d’œil à l’extérieur…
- Ce n’est rien, ce n’est que le policier municipal et une autre personne de la Mairie qui discutent entre eux en montrant Sirka… !
Rassurée, Marika reprit sa place à la table et continua sa partie de carte avec Irène. Il y eut encore quelques bruits de conversation et de pas qui s’éloignaient puis ce fut le silence…
Irène s’était levée et approchée à son tour de la fenêtre…
- Tiens, les deux hommes s’éloignent de la maison et je vois Sirka qui dort tranquillement sur le sol…
- Sirka dort tranquillement sur le sol mouillé ? Intriguée, Marika qui était un peu plus âgée qu’Irène s’approcha à son tour de la fenêtre et comprit de suite ce qui venait de se passer…
Sans dire un mot elle ouvrit la porte et courut en direction de la niche puis revint quelques instants plus tard en hurlant « Ils ont tué Sirka ! Ces deux hommes ont tué notre pauvre chien ! »
Marika rentra puis nous nous sommes assis tous trois devant la cheminée en pleurant…
Un quart d’heure plus tard, Grand-Mère entrait par la porte arrière et nous demanda ce qui se passait et pourquoi nous étions en larmes…
Marika expliqua ce qui venait de se passer et nous pouvions voir la colère et la fureur transformer les traits du visage de Grand-Mère. Sans un mot, elle retira son foulard mouillé, jeta une couverture sur ses épaules et ressorti en disant simplement :
- Je vais de ce pas à la Mairie pour avoir des explications… !
La Mairie était à un quart d’heure de marche de la maison et nous continuions de pleurer, non à cause de la perte de Sirka mais de peur que Grand-Mère ne tombe malade ou ait un accident en cours de route…
Ce n’est qu’une heure plus tard qu’elle est revenue, toujours dans une colère noire, traitant les responsables de la Mairie d’idiots et d’incompétents notoires auxquels elle avait clairement dit ce qu’elle pensait d’eux en des termes qui étaient loin d’être de la poésie.
Le lendemain, nous avons enterré Sirka dans un coin du jardin et avons mis une petite croix en bois sur la tombe.
- C’est un sacrilège de mettre une croix sur la tombe d’un animal ! La croix, c’est réservé aux êtres humains, hurla Grand-Mère en l’enlevant de la tombe…
Eddy aplanit puis ratissa l’endroit et y planta des fleurs vivaces. Les gens de la Mairie et du village quant à eux ne sont jamais venus poser de questions au sujet du ‘loup’ qui gardait la maison de Grand-Mère…
* * * * * * * * *
En ce début décembre, une quinzaine de jours avant Noël, nous jouions encore dehors car il ne faisait pas trop froid pour la saison. Le soir avant d’aller au lit, il n’y avait pas le moindre flocon de neige à l’horizon mais durant la nuit il y eut de telles chutes de neige que la maison de Grand-Mère fut entièrement recouverte le lendemain matin au réveil. L’épaisseur de neige était telle que nous ne pouvions plus ouvrir les portes car ces dernières s’ouvraient vers l’extérieur.
Grand-Père et Eddy ont tout d’abord dégagé la porte arrière et le chemin à l’aide de pelles et de beaucoup d’huile de coude. C’était un travail difficile car nous n’avions pas de véritables pelles à neige mais peu à peu, ils réussirent à dégager les entrées puis le chemin menant vers la grange afin que nous puissions aller nourrir les animaux de la Ferme. Ils travaillèrent sans relâche et ce n’est qu’à la tombée de la nuit que la situation fut sous contrôle.
Le lendemain, seules Irène et Marika eurent l’autorisation d’aller jouer dehors. Grand-Mère m’interdit fermement de sortir argumentant qu’elle ne voulait en aucun cas courir le risque de voir son petit diable enseveli ou perdu sous des montagnes de neige !
Nous étions au tout début de l’automne. J’étais assis à l’arrière du verger de Grand-Mère en compagnie des fils Kulas, nos voisins, et nous nous amusions lorsque soudain, un des Kulas, il me semble que c’était Julian, nous proposa de rouler des cigarettes. Je n’avais aucune idée de ce dont il parlait, car les deux frères avaient 3 ou 4 ans de plus que moi. Je suppose qu’ils connaissaient parfaitement leur affaire, mais moi je n’avais jamais vu quelqu’un fumer de cigarettes, les seules personnes que je connaissais fumaient de temps en temps un cigare et Grand-Père fumait tous les jours du tabac dans une pipe en bois qu’il avait fabriqué de ses mains.
- J’ai du papier mais pas de tabac dit Julian…
- Ce n’est pas grave, nous utiliserons des feuilles sèches de pommier, cela fera l’affaire ! Répondit son frère…
Puis ils se sont roulé chacun une cigarette de feuilles de pommier et en ont tiré de larges bouffées dont j’ai certainement avalé une bonne partie « à l’insu de mon plein gré »…
A la même période de l’année, Papa, Grand-Père et Eddy coupaient des arbres pour l’hiver. Ils avaient eu l’autorisation de couper certains types d’arbres de tailles bien définies et en avaient abattu 25 à différents endroit de la grande forêt située près du village. Ce jour-là, ils s’apprêtaient à ramener à la maison ce qui allait constituer notre future provision de bois de chauffage.
- Ramener ces 25 arbres à la maison avec un seul cheval nous prendra une éternité dit alors Grand-Père, Eddy, va demander aux Kulas si nous pouvons leur emprunter 2 chevaux pour la journée…
Les Kulas nous prêtèrent aimablement deux chevaux et, le lendemain après le petit déjeuner, Papa, Grand-Père et Eddy s’apprêtaient à partir pour la forêt. Je leur demandais si je pouvais les accompagner mais Maman et Grand-Mère ont dit non, car elles considéraient que c’était trop dangereux… J’insistais longuement et finalement, je réussis à convaincre Papa qui accepta d’un air attristé que je les accompagne…
Il y avait environ une heure de marche jusqu’à la forêt et j’étais confortablement installé sur le cheval de Grand-Père. À environ mi-chemin, le sentier, légèrement en pente, devenait de plus en plus boueux et défoncé suites aux fortes pluies d’automne et soudain, ma monture s’enfonça dans un trou d’eau profond et s’y enlisa en projetant sur moi des paquets de boue… Je me mis à hurler et à pleurer et Grand-Père et Eddy qui ouvraient le chemin, descendirent de leur cheval et s’approchèrent affolé du trou boueux dans lequel le cheval était enlisé…
Il fallait absolument qu’ils trouvent une solution et ce fut une fois de plus Grand-Père qui prit les initiatives. Je ne me souviens plus très bien comment ils m’ont tiré de là, mais je sais qu’ils étaient couverts de boue rougeâtre et qu’ils avaient utilisé des chaines accrochées aux deux autres chevaux pour tirer celui de Grand-Père de ce mauvais pas… De retour à la maison, ils ont raconté toute l’aventure à Maman et à Grand-Mère et Maman a répondu sèchement qu’elle nous avait prévenu du danger et de ne pas emmener le gamin avec eux !
Je ne me souviens plus s’ils ont ramené ce même jour les arbres coupés mais je me rappelle que durant toute la semaine ils ont passé leurs journées à couper et fendre d’énormes quantités de bois…
Toutes ces anecdotes ont eu lieu quelques mois avant que Papa et Maman furent emmenés dans les camps de travail en Allemagne. Les autorités allemandes ont tout d’abord réquisitionné Papa, puis, quelques mois plus tard ce fut au tour de Maman de rejoindre le camp allemand. Dans le prochain épisode des Chemins de ma vie, je vous parlerai de nos retrouvailles puis de notre départ vers le camp de travail allemand de Bad Grund. A suivre…
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Clément Keller : Le retour des Brabeks (10)
Nous sommes (toujours et encore !) en 2064 et des brouettes.
Le monde a bien changé et une équipe composée de savants, de techniciens et de personnages hors du commun a été mise sur pied pour partir à bord du vaisseau C-DLADOB vers les confins de notre galaxie afin de retrouver les traces d'origine de la civilisation humaine localisée sur la planète Manflou.
Le but de cette expédition, sponsorisée par le groupe Nauss-Talgia, leader incontesté du Blog tridimensionnel L.R.E.M. (Lassant, Ringard, Enervant & Mytho), consiste à récupérer les gènes d'origine de l'espèce humaine afin de les réimplanter dans l'ADN des dirigeants de notre planète pour leur redonner sagesse, intelligence et un sens aigu de la réflexion. Bref, une mission que l'on pourrait d'ores et déjà qualifier d'impossible. C. Keller
→ Remarque importante : si vous ne lisez pas les épisodes précédents, vous risquez de ne rien comprendre du tout à ce récit plein de rebondissements.
EPISODE 1 - EPISODE 2 - EPISODE 3 - EPISODE 4 - EPISODE 5 - EPISODE 6 - EPISODE 7
EPISODE 8 EPISODE 9 - EPISODE 11 - EPISODE 12 - EPISODE 13 - EPISODE 14
EPISODE 15 - EPISODE 16 - EPISODE 17 - EPISODE 18 - EPISODE 19
EPISODE 20 - EPISODE 21 - EPISODE 22
Pendant qu’Yves Abyen, revêtu de sa robe en Organza rose s’admirait dans la glace de sa chambre d’hôtel du Grand Hyatt à Berlin, les membres d’équipage conviés au briefing du Commandant Tifris et de son second Triac prirent place dans les fauteuils moelleux installés dans le poste de pilotage.
Tendrement enlacés, Chang-Tal et Ted Oupty, son pygmée en voie de croissance, avaient pris place sur un fauteuil unique et se murmuraient des mots tendres dans le creux de l’oreille pendant que Triac présentait un plateau avec des amuse-gueules à base de côtes de bœuf lyophilisés aux invités du Commandant.
Tifris avait vêtu pour l’occasion son costume de gala composé d’un pantalon ‘pattes d’élèph’ gris et d’un Blazer croisé bleu marine orné des nombreuses décorations qu’il avait glanées çà et là au long de sa carrière dans la N.A.S.A. (1)
Sur le revers gauche on reconnaissait l’étoile du grand mérite céréalier avec palmes, la grand-croix de l’obéissance conjugale irréversible ainsi que la Zébulette (2) du compromis abstinent. Le revers gauche était constellé de différents rubans glorifiants faisant référence à des actes héroïques et des services rendus à la demande du grand Commandeur Frolande Ansoy… On y trouvait pêle-mêle le ruban Publik, le ruban Pourlakass, le ruban Kahl, ainsi que toute la collection des rubans Donéons et Djoh, distinctions exclusivement réservées aux astronautes musiciens sachant jouer ‘Apache’ sur une Fender Stratocaster. (3)
Après les amuse-gueules Triac proposa à l’auditoire un choix de vins puisés dans la réserve spéciale de Luping-Dépyss parmi lesquels un excellent Château Margot qui ne semblait pas être au goût de Vincent Douitche qui fit la moue après avoir trempé le bout des lèvres dans son verre…
- Sans vouloir vous offusquer mon bon Commandant, votre vinasse n’arrive pas à la cheville d’un Kaefferkopf de Katzenthal, ma patrie alsacienne d’adoption… !
En entendant la remarque faite par Vincent, Triac faillit lâcher la bouteille de Château Margot…
- Non, non et non Douitche ! Le Kaefferkopf n'est produit qu'à Ammerschwihr ! Faut arrêter de dire n’importe quoi ! La moitié du vin qui coule dans mes veines, pardon, du sang qui coule dans mes veines est alsacien et je sais de quoi je parle ! Ces parcelles de vigne sont à flanc de coteau, entre 240 et 350 mètres d'altitude, sur des pentes fortes jusqu’à 35 %, exposées plein est ou au sud-est, au-dessus du village d'Ammerschwihr et jusqu'à la limite avec Katzenthal plus au sud. L'aire plantée est de 71,65 hectares, séparée en deux zones par le ruisseau du Walbach... Non mais on ne me la fait pas à moi !
Vincent se leva mais n’eut pas le temps d’argumenter, le Commandant allait prendre la parole et ce dernier détestait les discussions sans fin dans lesquelles chacun campait sur ses positions…
Tifris sauta d’une enjambée sur l’estrade, trébucha sur un os de côte de bœuf que Triac avait laissé trainer, faillit se casser la figure mais se rattrapa au dernier moment au bras de France Ouaze qui lui tendait le micro… Il jeta un regard furieux en direction de son second, se racla la gorge et prit la parole.
- Chers amis et chers membres d’équipage, avec le docteur France Ouaze ici présente nous avons pris une décision grave qui va pour la première fois à l’encontre de nos principes les plus chers, je veux parler de l’obéissance aux ordres et la loyauté. L’ordinateur central a pris la décision d’obliger notre équipage à se faire vacciner et, pour la première fois dans l’histoire du C-DLADOB nous n’allons pas suivre ses ordres. Comme France Ouaze l’a déjà expliqué à certains d'entre-vous, nous allons procéder à une vaccination fictive suivie d’une grande fête et nous attendons vos remarques, vos suggestions ainsi que les initiatives dont vous, les membres dirigeants, j’en suis sûr, sauront faire preuve.
Le premier à prendre la parole après Tifris fut Triac qui suggéra que la fête à venir porterait le nom de F.B.I. (Fiesta du Bœuf Intergalactique) et qu’il se portait volontaire pour s’occuper du Barbecue à aspiration (4).
Vincent Douitche demanda la parole pour développer l’idée de rajouter une soupe aux vermicelles et au Tapioca au menu afin de contenter également les convives allergiques à la côte de bœuf cuite à l'os. Luping Dépyss défendit ensuite l’idée d’une entrée à base de confiture de Cedrat et de Calamondin (5) avec un Bloody Mary en apéritif ainsi que du Whisky-Soda à gogo…
Ted Oupty quant à lui proposa sans hésiter de servir à l’équipage le plat traditionnel de son village natal le fameux N’doko-mboka arrosé d’Odontol (6) tandis que Chang-Tal revendiqua un repas local à base de Mehlkneddele et de Geheiradde servis avec du Dibbelabes et des Dampfnuddele (7)…
Devant la variété des plats et des boissons proposées par les uns et les autres et surtout pour éviter toute forme de frustration, Tifris et Triac décidèrent d’un commun accord de procéder à un savant mélange des différents plats afin de contenter chacun des représentants et d’offrir ainsi un menu cosmopolite aux membres de l’équipage.
Le choix du repas et des boissons fut ainsi arrêté, Chang-Tal et Ted furent chargés de coordonner la partie alimentaire et l’organisation de la cuisine tandis que Luping-Dépyss endossa la responsabilité du choix des différentes boissons et des confitures car il était le seul à bord à posséder une cave de plus de 400 bouteilles dont quelques rares flacons d’Odontol ainsi qu'une centaine de bocaux de confitures aux noms plus qu'exotiques.
Il ne restait désormais plus qu’à régler le problème de l’orchestre qui allait animer cette mémorable soirée et la fête pouvait commencer…
* * * * * * * * * *
Entre-temps, Bloc le Rek s’était changé et avait troqué sa blouse de chercheur contre son vieux costume de trappeur à franges, car c’était dans ses vêtements « civils » qu’il se sentait le plus à l’aise. Cela lui rappelait ses jeunes années vers 2020 quand il réalisait des Clips de présentations scientifiques à l’attention du grand public sous le nom de professeur Louphoque. Aujourd’hui, en 2064, il lui arrivait de regretter cette époque insouciante lorsque les premières voitures hybrides ou électriques firent leur apparition sur des autoroutes encore payantes, et il se souvint de son iPhone 12 à l’effigie de la pomme, du magasin Click & Collect où il faisait livrer ses courses et des infos en continu où l’on pouvait suivre en direct les manifestations de gilets jaunes, l’évolution du nombre de vaccinés et les longs discours politiques des dirigeants du pays… Mais tout ça c’était déjà si loin... Était-ce cela que les "anciens" avaient coutume d’appeler le bon vieux temps… ?
Avant de quitter son labo, il se coiffa de son habituel bonnet de fourrure à queue de castor et se regarda pendant un instant dans le miroir tridimensionnel accroché au-dessus de sa table de travail toujours encombrée d’éprouvettes, de flacons multicolores remplis de produits chimiques divers et d’un bec Bunsen qu’il éteignit au passage.
Bloc avait décidé d’arrêter ses recherches et d’aller prendre l’air.
L’atmosphère confinée de son laboratoire commençait à lui peser et la nouvelle de cette vaccination obligatoire de l’équipage le rendait nerveux. Il ramassa au passage sa besace en peau de loutre galvanisée et quitta d’un pas alerte sa cabine.
Les idées se bousculaient dans sa tête… Fallait-il jouer le jeu et aider France Ouaze à mener à bien la « vaccination » ou bien devait-il se désolidariser complètement de ce qu’il considérait comme une nouvelle manipulation inutile ?
Perdu dans ses pensées il prit le premier couloir à sa droite et se retrouva devant l’entrée de la salle de téléportation dont la porte était restée entr’ouverte.
Tiens, se dit-il, je n’ai jamais eu l’occasion de visiter cet endroit, allons y faire un petit tour, ça me changera les idées… A suivre...
(1) Nos Astronautes Sont Alcoolisés
(2) La Zébulette (prononciation : Zé Buh-Laithe) est un ardillon en forme d'esperluette torsadé façon muselet et dont le tire-croc peut s'accrocher au revers d'un veston.
(3) Tifris possède en effet une superbe guitare Fender Stratocaster entièrement dans son jus et, malgré son âge avancé, il est encore capable de jouer Apache, le morceau le plus connu des Shadows.
Pour écouter ce chef d'oeuvre des années 60, CLIQUEZ ICI.
(4) Le Barbecue à aspiration (Barbystor) a été mis au point par Piotr Thyristor lors de la première mission du C-DLADOB. Pour des raisons évidentes de manque de pesanteur, les côtes de bœuf qu’il voulait griller flottaient systématiquement au-dessus du Grill et Piotr eut l’idée géniale d’intégrer dans le corps du Barbecue une turbine aspirante qui plaquait la viande contre la grille. Un brevet international fut déposé en 2048 et depuis, tous les vaisseaux spatiaux sont équipés en série d’un Barbystor à aspiration.
(5) Luping-Dépyss exploite une plantation de ces fruits rares et méconnus dans l'enceinte de son usine de confiture située dans sa propriété terrestre de Scheu-Nec. Vous trouverez plus d'infos sur ces fruits ICI
(6) Plus d'explication sur cet alcool encore mal connu sous nos latitudes en cliquant ICI.
Ted Oupty en fait une grande consommation car ce breuvage aurait des propriétés aphrodisiaques incontestables (aux dires de sa compagne Chang-Tal).
(7) Quelques-unes de ces recettes locales sont présentées ICI. En ce qui concerne le N’doko-mboka veuillez consulter le Blog privé de Ted & Chang-Tal Oupty (Mes fantasmes avec Teddy, Blog à accès payant réservé aux majeurs vaccinés de + de 18 ans).
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De Calcutta à Katmandou.
Lors de nos missions nous passions, à l’aller ou au retour, par Dehli ou Bombay pour des rendez-vous professionnels avec notre client qui avait des bureaux dans ces villes.
Notre société nous laissait une certaine liberté pour y séjourner le temps que nous jugions nécessaire, ce qui nous permettait également de faire un peu de tourisme.
Mais, bien sûr, Calcutta était l’étape incontournable de nos voyages.
Au début des années 70 avait eu lieu la guerre entre le Pakistan occidental et Pakistan oriental qui a donné naissance à l’état du Bangladesh. (Plus d'infos ICI)
A cette époque des dizaines de milliers de réfugiés vivaient dans les rues de Calcutta, dans des conditions difficilement imaginables pour les occidentaux que nous étions.
Malheureusement beaucoup de ces personnes décédaient pendant leur sommeil, et, chaque matin, un groupe de policiers munis de sticks en bambou, faisait le tour du quartier, donnait un coup de stick sur la plante des pieds des personnes encore allongées, celles qui ne réagissaient pas était embarquées dans un petit camion qui suivait la troupe.
Les premiers contacts avec cette misère ne s’oublient jamais. Mais la nature humaine étant ce qu’elle est, au bout de quelques voyages, cela faisait simplement partie du paysage.
Le spectacle dans la rue était pour le moins dépaysant, mais l’on pouvait se promener, sans craintes dans n’importe quel endroit, même dans les lieux les plus improbables.
Lorsque nous sortions de l’hôtel, nous étions immanquablement assaillis par une foule de mendiants, qui étaient fort nombreux à cette époque. Mais très rapidement, le portier de l’hôtel nous a expliqué qu’en fait, les mendiants de Calcutta faisaient tous parti d’un « syndicat », auquel ils remettaient, le soir, une partie de leurs « recettes », en échange de quoi on leurs assurait le gite pour la nuit.
Ces mendiants étaient organisés, chaque groupe était supervisé par un « chef » et avait son secteur d’activité. Donc, le matin en sortant de l’hôtel, nous appelions le chef de secteur, et négociions avec lui un forfait journalier, en fait l’équivalent de 2 à 3 francs, et étions tranquilles pour la journée, quel que soit le quartier ou nous étions.
Calcutta en février 1968 (Document Louis Malle)
Un des endroits les plus remarquables à Calcutta est le « New Market » dont je vous laisse découvrir quelques images récentes tirées du Net : Cliquez ICI
Seuls, nous ne serions vraisemblablement, ressortis que difficilement de cet immense « souk », mais il y avait à l’entrée des coursiers avec de grands paniers qui, moyennant quelques roupies, vous accompagnaient pour porter vos courses, et vous guider vers les échoppes en fonction de ce que vous recherchiez, et bien sûr vers celles qui leurs reversaient une petite commission sur vos achats.
En général les marchands n’étaient pas insistants, n’essayaient pas de vous vendre quelque chose à tout prix, comme j’ai pu le constater dans certains pays outre Méditerranée.
Une fois, à un marchand un peu plus insistant, et qui voulait absolument me vendre quelque chose, je finis par dire, pour rire : je voudrais acheter un pistolet, persuadé qu’il allait me dire qu’il ne vendait pas ce genre de chose et que je n’en entendrai plus parler.
A notre voyage suivant, notre coursier, qui trainait souvent devant l’hôtel, en quête de clients à accompagner, nous aborde et nous entraine chez notre marchand, qui tout fier m’a sorti la chose que j’étais sensé lui avoir commandée, une belle arme de poing, dans un magnifique coffret !
Je n’ai, bien sûr, pas honoré ma soi-disant commande, mais lui ai acheté quelques mètres de soie et quelques autre bricoles.
Une fois nous étions invité, avec mon patron, qui était un Alsacien pas triste du tout, à déjeuner au « Bengal Club » haut lieu des traditions British à Calcutta.
Pour rire, il a proposé de nous y rendre en taxi local, donc une bonne vieille diligence tirée par de chevaux. Notre arrivée entre les Rolls et les Jaguars, a fait pour le moins désordre, mais nous, on s’est bien marré, et avons fort bien déjeuné.
Lors d’un retour de Sindri, au mois de novembre, nous nous sommes retrouvé à Calcutta un jeudi avec un rendez-vous programmé le mardi suivant à Dehli.
Pour passer le temps, mon patron nous a organisé un voyage à Katmandou.
Ce qui m’a, personnellement le plus frappé lors de ce voyage, c’est la couleur et la luminosité du ciel exempt de toute pollution industrielle, ainsi que la « zénitude » qui régnait dans cette ville et dans les bourgades que nous avons visitées.
L’architecture y est également remarquable, évidemment adaptée au climat.
Le Népal compte une forte population Tibétaine, en majorité Bouddhistes, et on y trouve donc de nombreuses Stupas : (Plus d’infos ICI) ainsi que beaucoup d’école Bouddhistes.
Mais ce qu’il y a de plus extraordinaire c’est que, prenant un drink au bar de l’hôtel, quelqu’un me tape sur l’épaule et me dit en bon patois Forbachois : « Ah, was march don dou dho ? » (Mais que fais-tu donc toi ici) ?
Il s’agissait d’un Monsieur que j’avais côtoyé lors d’un stage d’étudiant au supermarché Schroeder à Forbach, qui avait créé la société Marquis, spécialisée dans le commerce de jouets, et qui rentrait d’une mission d’achats dans les pays du sud-est asiatique.
Comme quoi le monde est vraiment, très petit.
L’autre souvenir, inoubliable de cette escapade, est le départ en taxi en pleine nuit, pour nous rendre dans un petit village, complètement perdu dans la campagne Népalaise pour assister au lever du soleil sur l’Everest. A suivre...
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