NOSTALGIA, le Blog qui fait oublier les tracas

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J.F. Hurth : mission humanitaire au Népal 2017

Depuis une quinzaine d'années je suis membre d'une association humanitaire intitulée LORRAINE - NEPAL, dont le siège est à Thionville.

L'objectif de cette association, créée en 1997, est de contribuer aux soins de la population et à la scolarisation des enfants, et ce dans un secteur très isolé, entre trois et quatre mille mètres d'altitude, à environ 250 Kms au Sud/Est de KATMANDOU, la capitale du pays.

Il y a quelques jours maintenant que je suis rentré d'une 4ème "mission" de près d'un mois dans cette Région. Cette fois-ci, nous étions une équipe de 5 membres de l'association, dont une femme "Médecin".

L'objectif de notre voyage consistait à vérifier l'état de fonctionnement des Centres de soins et des Ecoles primaires que nous avons construits là-bas depuis des années. L'ensemble au profit des 551 enfants que nous parrainons, progéniture d'une population estimée… à près de 3000 personnes. Notre objectif était aussi de vérifier les réparations effectuées avec notre aide financière, de nombre de maisons d'habitation, après le tremblement de terre de 2015, qui a particulièrement touché notre zone de compétence.

Nous avons donc visité 6 gros villages où sont implantés nos Centre de Soins et nos Ecoles primaires. Ces structures reçoivent non seulement les ressortissants des villages, mais aussi toute une population rurale, pauvre et très disséminée dans les endroits les plus reculés et souvent, les plus inaccessibles.

Je dois préciser que dans cette région il n'y a aucun autre moyen de transport et de déplacement que pédestre. L'approvisionnement de la population se fait donc exclusivement avec des Mules, des Yaks ou des Sherpas.

Une précision à propos du terme Sherpa souvent assimilé à de simple "Portefaix".

Il s'agit en réalité d'une ethnie d'origine Tibétaine, qui pratique essentiellement l’agriculture, l'élevage et le commerce. Depuis les années 50 avec le tourisme ils sont devenus, porteurs d'altitude, guides de haute montagne, propriétaires d'agences de voyages ou aubergistes sur les circuits de Trekkings

De philosophie Bouddhiste bien sûr, ce peuple ne connait ni l'agressivité, ni le désir de domination. Ils croient en la réincarnation et pensent que toutes les souffrances qu'ils vivent dans cette vie, seront portées à leur crédit dans la suivante, laquelle sera donc forcément meilleure.

Dans le registre de l'amour, les effusions en public n'existent pas. Notre fameux "coup de foudre" ils ne connaissent pas. Quand à "l'Amour" comme nous l'entendons, ils s'en passent forcément, puisque les mariages sont presque toujours "arrangés", pour des raisons de transmission de patrimoine. Le cas échéant, mais de moins en moins, ils pratiquent la "Polyandrie", autrement dit la femme de l'aîné appartient aussi aux autres frères. Donc exit la jalousie chère à notre culture.

Malgré leur taille modeste, ils ont une résistance physique hors du commun, et une intelligente bonne humeur de tous les instants. Ils disent rarement "non", mais savent convaincre du contraire après avoir répondu "oui". L'alcool et l'ivrognerie sont du domaine de l'exception. Là-bas c'est le  Black Tee ou le Lemon Tee qui l'emportent.

Quand au cholestérol et à l'obésité c'est encore plus simple, ils ne peuvent pas se les payer. Le tourisme est pour eux un complément de revenu considérable et ils savent, malgré de très modestes moyens, le "vendre" de la meilleure manière.

 

 

Pour arriver dans nos villages précédemment évoqués, il faut préciser qu'ils sont éloignés les uns des autres à 6 heures de marche en moyenne, avec des dénivelés toujours considérables. Nous partons donc de très bonne heure le matin.

Vers 13 heures nous sommes accueillis par le Chef du village et une délégation d'habitants qui nous reçoivent avec des symboles de bienvenue, qu'il est "IMPOSSIBLE DE REFUSER", notamment des couronnes de fleurs et des Kata par dizaine et par personne (foulards de toutes les couleurs). Ensuite, nous sommes invités à une  petite "Fête des Ecoles", souvent très joliment organisée par les responsables, les enseignants et les parents bien entendu.

Les enfants, vêtus de l'uniforme qui fait partie de la dotation de parrainage, consacrent alors leur très enviable statut "D'ECOLIER", en présentant des danses ou des sketches qui n'ont rien à envier aux fêtes de fin d'année de nos établissements scolaires.

Ensuite l'après-midi se passe à vérifier TROIS éléments :

 

1) Tout d'abord L'IDENTITE de chaque enfant que nous parrainons. Oui, là-bas, pour d'obscures questions de tradition, les patronymes peuvent changer rapidement et le même enfant peut s'appeler différemment l'année suivante. Parfois on aura ajouté ou enlevé une syllabe après la naissance d'un frère ou d'une sœur... Nous devons donc tous les ans, photographier l'enfant avec son matricule. Cette pratique étant pour le parrain Français, la seule garantie d'authenticité de son engagement.

 

2) Ensuite le CARNET DE NOTES,  où nous voyons bien sûr les résultats, mais aussi l'assiduité par la présence ou l’absence de l'enfant.

 

3) Et enfin LA SANTE de l'enfant, avec l'expertise du Médecin et les observations de l'enseignant.

 

Si l'ensemble est satisfaisant, nous remettons à l'élève en présence de ses parents et après signature, une enveloppe correspondant en "Roupies" à 60 Euros, prix du "parrainage" pour une année scolaire. Cette somme, largement suffisante, correspond en réalité au coût annuel d'un ouvrier, que devra embaucher la famille, en remplacement de l'enfant devenu écolier.

Ces vérifications et ces regroupements nous prennent environ un jour par village, car il ne faut pas oublier que là-bas, un enfant peut facilement avoir 6 heures de marche quotidienne pour fréquenter son école qui est dépourvue de cantine bien entendu.

Une partie de notre équipe s'occupe aussi de recueillir les doléances de la population signalée par le Chef de village, afin de déterminer dans la mesure de nos moyens, l'aide matérielle que nous pouvons apporter dans l'urgence aux nécessiteux.

D'autres vérifient le bon fonctionnement des "Centres de Soins" et le travail réalisé par une sage-femme et trois infirmières que nous employons aussi. L'ensemble des emplois ainsi créés, si l'on y ajoute les enseignants, est de 12 personnes que nous rétribuons à hauteur de 15.OOO roupies, soit 134 Euros mensuels. Pour mémoire, un repas dans une gargote, coûte environ 150 roupies (1,2 Euros).

Lorsque dans les villages concernés il n'y a pas de gîte (çà s'appelle Lodge là-bas), nous dormons chez l'habitant, mais là, je ne vous raconte pas, je vous invite juste à vérifier par curiosité la signification étendue du mot : Spartiate.

Les soirées sont souvent très longues et froides... Même avec l’harmonica. Il faut dire qu'à ces altitudes les boîtes de nuit et les cinémas sont vraiment rares. Quand aux immenses zones piétonnes, elles sont très mal éclairées... Non, vous vous en doutez bien, une fois dans le gîte, on n'en sort plus, et on attend le lendemain, car dehors il n'y a strictement rien à voir. Mais bon, il reste la lecture et le sac de couchage.

Personnellement j'ai dormi tout habillé avec Parka, pratiquement durant tout le séjour de cette année. Quand aux toilettes, elles sont presque toujours "au fond du jardin", et pour se soulager sans sortir dans le froid et la nuit, on pisse dans de merveilleux récipients  Décathlon, soldés 4 Euros 50 cette année. Sauvés !

 

A l'issue de la mission humanitaire d'une semaine et demie en général et qui est entièrement à notre charge, nous terminons notre séjour par un Trek d'une dizaine de jours, encadré par deux guides avec porteurs.

Ma surprise au cours de l'itinéraire choisi cette année, a été de retrouver un personnage extraordinaire déjà rencontré en 2013. Pour le revoir nous avons dû quitter le groupe pendant deux jours avec mon ami  J. Claude et Sophie, notre "femme médecine".

Il fallait monter à 4400m, où ce Sherpa  pas comme les autres, tient un petit gîte avec sa femme et ses deux petits-enfants.

Arrivés là-haut, pour y passer une nuit supplémentaire et très fraîche..., je retrouve  mon PEMBA (c'est son nom), l'ami de 2013. Il me reconnaît ce qui me rassure, car lui.., n'avait pas changé.

Ce type respire l'équilibre, l'harmonie et la sagesse mieux que quiconque. Il parle pas mal le français et maîtrise évidemment l'anglais, mais sa particularité est unique :

En 2013, il avait déjà gravit l'EVEREST HUIT FOIS ! Oui, 8 fois et pas seulement en qualité de vainqueur planteur de drapeau avec photo, comme ses clients. 

Non ! Mais en tant que "GUIDE/ PORTEUR", ce qui est autrement difficile, tout le monde le comprendra.

A ma question… Et depuis qu'as-tu fais ? Il nous précise qu'il a récidivé en 2015 et 2016, ce qui porte son record  attesté par les diplômes qui tapissent sont gîte, à 1O ascensions de L'EVEREST à l'âge de 42 ans. Sa femme qui était avec nous, a juré que plus jamais elle ne le laisserait repartir, car ils sont très heureux dans ce gîte que le gouvernement leur a permis de gérer à vie.

Lorsque je lui ai expliqué qu'avec un tel palmarès en France on lui aurait certainement confié un très Haut poste au Ministère des Sports,  il m'a simplement dit :

- Je sais çà… Djann Franssoaa, mais tu comprends, je suis Népalais et ici je suis chez moi. Et puis tu vois me dit-il avec un large sourire, l'Everest il est à 8848 mètres, ici à 4400 je vis presque dans la plaine, alors...

On a gâté ses enfants avec des friandises achetées dans sa boutique. Lui et sa femme ne voulaient rien.  Mais vous ne m'ôterez pas de l'esprit qu'ils avaient déjà beaucoup.

Je voudrais terminer ce récit par une émotion vécue au cours d'un autre Trek assez mémorable, celui de 2007. Oui, parfois la réalité dépasse la fiction sur notre vieille planète et il peut même arriver que l'étrange lucarne télévisuelle fasse pâle figure, même si l'émission choisie s'intitule "Emotions/Voyages".

Si vous  voulez bien me croire, voici comment se sont passées les choses ce jour-là.

Le circuit du Trek passait par ce que les Agences de Voyages appellent, "LE SANCTUAIRE DES  ANNAPURNAS", avec en point d'orgue, 2 nuits au camp de Base N°1, à 5314 m. d'altitude du mythique EVEREST. Ce dernier, encore appelé le Toit du Monde, affichant sans le moindre complexe ses 8848 mètres bien sonnés.  

Je m'empresse de préciser que pour tout bon marcheur, avec une forme physique raisonnable, ce n'est pas une performance, sachant qu'il n'y a aucune escalade, juste la gestion du manque d'oxygène. Pour certains qui souffrent comme moi du M.A.M. (mal aigu des montagnes), il faut inclure une inappétence et un mal de tête lancinant.

Ce MAM, c'est un peu comme le mal de mer ou le vertige. On vient au monde "avec" ou "sans" et ensuite on se débrouille comme on peut.

Bref, comme dans tout effort soutenu, c'est la tête qui doit motiver les jambes.

Dans mon cas, lorsque je suis au bout du bout, je pense à la mine que j'ai connue dans les années cinquante. Je pense à ce vieux Puits GARGAN, de Petite-Rosselle, à sa sirène qui a rythmé ma jeunesse et la dure vie de ma famille. Alors tout devient singulièrement facile, même au Népal.

Donc ce jour-là, nous progressons à 5000 mètres environ dans une vallée encaissée entre ces fameux ANNAPURNA, qui nous font la nique du haut de leur 7 à 8000 m. Il est vrai que ces gros monstres, chauves, blancs et silencieux, font beaucoup d'ombre aux Français "tout DECATHLON équipés", que nous sommes.

Un vent violent vient de se lever. Sac au dos et anoraks serrés au cou, capuche avec bonnets enfoncés, nous avançons en file indienne dans le froid, au milieu d'un reg d'une incroyable austérité.

Au loin, sans pouvoir distinguer vraiment, plusieurs silhouettes. Nous approchons péniblement pour constater qu'il s'agit de 3 enfants, des garçons apparemment.

12 ans environ pour le plus grand, 8 ans pour second et 4 ans estimés pour le plus petit.

A l'approche de notre groupe, l'ainé se lève torse nu et en short déchiré, se précipite derrière un rocher, en revient avec une paire d'échasses, s'élève ainsi à deux mètres du sol et danse. Celui de huit ans, saute derrière un autre rocher et revient avec un tambourin qu'il frappe en cadence pour accompagner la danse de son frère. Le troisième torse et pieds nus, short en haillons comme ses frères, dort à même le sol d'un sommeil candide. Ses frères le réveillent sans ménagement, le gamin s'étire, se lève et les pieds nus sur les cailloux pointus, dans ce froid, se met à danser pour accompagner ses frères.

Son numéro terminé, il se couche et bientôt se rendort.

Ses grands frères se rassoient, nous regardent avec leurs grands yeux, ne disent rien et de demandent rien. Bien sûr on leur donne à manger et des sous avant de chercher à comprendre. Notre guide sherpa nous explique alors qu'ils sont orphelins depuis 2 ans, qu'il les a déjà vus dans ce secteur, et qu'ils vivent au jour le jour. Ils ont choisi cette austère vallée sans "concurrence de mendicité" , pour survivre grâce aux quelques touristes qui empruntent cette voie.

Le regard et l'extraordinaire candeur de ces gosses sont tellement insoutenables, qu'après notre obole, je m'écarte, je ne vois plus rien, mon regard devient étrangement trouble.

Deux amis me rejoignent dans le même état.

De retour chez moi cette année-là, ma fille m'a trouvé amaigri, assez moche et pas bronzé. Quant à mon épouse, très contente de m'embrasser tout de même, c'est en me serrant dans ses bras qu'elle m’a dit : Faudra mettre tout çà  au "sale", ça fera deux "machines".

Alors j'ai compris qu'il était temps de passer sous la douche et de me refaire une beauté lorraine.

Depuis ce mémorable jour de rencontre des enfants échassiers HIMALAYIENS, il y a donc plus de dix ans maintenant, j'ai vainement sillonné dans ma roulotte des temps modernes, tous les coins de notre bonne vieille France qui va si mal, paraît-il.

Je n'ai jamais vu une situation de détresse de la même intensité. Même pas dans le redoutable BAERENTHAL, en plein  massif du célèbre BITCHERLAND.

Etonnant non ? Jean-François Hurth, alias Blog/ Fronz

 

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Pour en savoir plus sur l'Association LORRAINE - NEPAL à Thionville, CLIQUEZ ICI

 

COMBIEN COÛTE UN PARRAINAGE ?

- 20 Euros pour l'adhésion à Lorraine Népal.

- 60 Euros pour le parrainage proprement dit. Soit 1 année d'école pour le filleul.

Au total donc 80  Euros. Cette somme est déclarable sous forme de don. L'association vous fait parvenir en début d'année un justificatif qui ouvre droit à une réduction d'impôt de 66 % l'année suivante. Autrement dit, le parrainage d'un enfant revient in fine à env. 53 Euros. Tous les ans vous aurez la photo de votre filleul, ainsi que sa fiche signalétique qui vous permettra de correspondre avec lui.

 

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08/12/2017

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