NOSTALGIA, le Blog qui fait oublier les tracas

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Clément Keller : Elle a eu chaud !

Le père Kolobanski (1) était cocu depuis pas mal de temps, et comme bien souvent dans ces cas-là, il en était le dernier informé.

Lorsque ses copains lui annoncèrent la nouvelle, il réagit comme la plupart des cocus du monde et refusa d'abord de croire ce qu'il appelait des ‘racontars’ puis pria incessamment ses amis d'arrêter de propager ce genre de ragots faute de quoi il leur montrerait de quel bois il se chauffait.

 

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Mais il devint tout de même un peu plus méfiant et fut pris d'un léger doute lorsqu'il surprit dans les conversations grivoises de ses amis, quelques points de détails qui le firent réfléchir. Il lui semblait que ses copains savaient certaines choses de sa vie privée qui ne concernaient à priori que sa femme et lui...

Quand ses doutes se transformèrent en certitude, il prit garde de ne rien laisser paraître de ses soupçons, et continua, mine de rien, à vaquer à ses occupations quotidiennes.

Il partait tous les jours travailler à la mine, sa musette sur le dos, et ne changea rien à ses habitudes qui puisse donner l'alerte à son épouse.

Ce n'était qu'un matin grisâtre de fin d’automne qu'il décida de prendre sa revanche.

Comme tous les jours, il déjeuna copieusement, récupéra la musette avec le casse-croûte et le ‘Kaffeeblesch’ (2) puis sortit de chez lui un peu avant treize heures pour aller prendre le train du poste d'après-midi. Il se permit même de lancer un sonore ‘à ce soir’ à son épouse qui était restée debout sur le pas de leur porte.

Il avait été informé par un ami digne de confiance qu’à peine arrivé à la hauteur du chemin qui coupait à travers la forêt, sa femme ouvrait la fenêtre qui donnait sur le jardin et faisait entrer son amant dans leur chambre à coucher.

Kolobanski avait rejoint sa bande d’amis du poste d’après-midi, les salua, parla de choses et d'autres, plaisanta comme à son habitude puis, prétextant soudain l'oubli de son paquet de cigarettes, quitta le groupe en confiant sa musette à son ami Boleslaw et regagna en courant la cité. 

Il arriva hors d’haleine devant chez lui et essaya aussitôt d'ouvrir la porte d'entrée.

Elle était bien évidemment fermée de l'intérieur, et les bruits de voix étouffés qu'il entendit à travers la cloison lui confirmèrent que Madame n'était pas seule à la maison...

Il contourna la baraque et entra dans le jardin. Au moment où il s'engagea dans l'allée, il vit une silhouette en bras de chemise sauter à travers la fenêtre puis s'enfuir en courant vers les bois. Il eut juste le temps de reconnaître le grand Wladek, mais cela n'avait dans le fond plus aucune importance, la seule chose qui l’intéressait c'était de donner une leçon mémorable à son épouse infidèle.

Il rebroussa chemin et retourna vers la porte d'entrée que sa femme avait ouverte entre-temps. Stanislas s'engouffra sans un mot à l'intérieur de la baraque en claquant violemment la porte derrière lui.

Son épouse légitime était livide et terrorisée. Elle le vit s'approcher de la cuisinière qui ronflait dans la pièce, et ne comprit pas pourquoi le premier geste de son cocu de mari fût de charger le fourneau avec plusieurs pelletées de charbon.

 

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Elle pensait qu'il allait lui mettre une bonne paire de baffes comme il l'avait déjà fait en d'autres occasions (3), mais non, son Stanislas s'occupait exclusivement du fourneau.

Pendant quelques minutes elle essaya même de se justifier en balbutiant des explications confuses, mais le mari bafoué ne semblait prêter aucune attention à ses jérémiades, il s'occupait uniquement du feu.

Il activa la combustion en ouvrant le tirage au maximum et, toujours sans un mot, attendit, debout à côté du fourneau, que les plaques de cuisson soient rouges de chaleur.

L'inquiétude de la femme grandissait. Elle commençait à tourner nerveusement en rond dans la pièce, le visage défait et le regard absent.

Son mari n'avait pas prononcé le moindre mot depuis qu'il était rentré et elle se doutait bien qu'il n'ignorait plus rien de sa liaison coupable avec le voisin.

Ce qui l'inquiétait le plus c'était de ne pas savoir à quelle sauce elle allait être accommodée. Elle aurait préféré qu'il lui balance tout de suite une volée mais Stanislas Kolobanski restait de marbre et ne bronchait pas.

Le feu ronflait de plus en plus fort, et elle était de plus en plus inquiète...

Quand le père Kolobanski considéra que le moment était arrivé, il empoigna son épouse par la taille, la souleva sans effort apparent comme il l’avait fait lors de leur nuit de noces et la déposa sur la plaque de la cuisinière chauffée au rouge.

Il se contenta de lui crier que si elle avait le feu au c.., autant que ce soit vrai puis sortit de chez lui en claquant la porte du domicile de moins en moins conjugal.

La mère Kolobanski poussait des hurlements horribles. Le court instant qu'elle avait passé assise sur le fourneau lui avait occasionné des brûlures sérieuses et ses cris eurent vite fait de rameuter tout le voisinage.

Tous les habitants de la rue étaient maintenant rassemblés devant la baraque dans laquelle s'était déroulé le drôle de drame et ce furent les gamins qui propagèrent en premiers la mésaventure fumeuse dans la cité...

Le Kolobanski a assis sa femme sur la cuisinière et lui a brûlé le c.. parce qu'il l’a vu faire trico-traco (4) avec le voisin..."  

Sa vengeance d’homme bafoué n’avait duré qu’une dizaine de minutes et le père Kolobanski était reparti en courant vers la Halte-Schoeneck (5) pour ne pas rater son poste.

Il réussit de justesse à sauter sur le marchepied du train qui était déjà en marche et dans lequel l'attendaient ses collègues de travail.

Voilà, leur dit-il en récupérant sa musette, j'avais encore un petit problème à régler, mais maintenant c'est bon, on peut y aller !

Son petit problème était entre temps pris en main par une voisine charitable qui s'activait à calmer la douleur de la victime en lui enduisant copieusement la partie la plus charnue de son anatomie avec de vieux linges imbibés d'huile.

Il était bien sûr hors de question d’appeler un docteur, cette affaire était bien trop personnelle et la victime aurait dû répondre à plein de questions gênantes.

En tous cas, la leçon avait porté ses fruits. Wladek ne mettrait plus les pieds chez elle se dit-elle tout en essuyant d'un revers de main tremblante les larmes de douleur qui coulaient sur ses joues en feu…

Il n’y eut ni enquête de police, ni plainte ni nouveau drame.

La leçon avait porté ses fruits et, à partir de ce jour mémorable, Madame Kolobanski devint une épouse aimante et fidèle qui ne s’écarta plus jamais, si l’on en croit la rumeur publique, du droit chemin.

Le seul fait de penser à ce faux-pas extra-conjugal ravivait aussitôt en elle une vieille douleur à un endroit de sa personne que la décence m’empêche de nommer ici…

Ça aussi, c’était la Ferme de Schoeneck

 

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(1) Les noms des personnages ont bien sûr été changés...

(2) Cliquez ICI pour voir à quoi ça ressemble..

(3) Oui, je sais, à l'époque certains maris faisaient peu cas des droits de la femme en général et de la leur en particulier !

(4) Inutile de vous faire un dessin je présume...

(5) Plus d'infos sur cet endroit en cliquant ICI

 

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02/05/2019

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